Une première cartographie globale de la diversité génétique des poissons pour mieux cibler les efforts de conservation

Communiqué de presse Ecologie et environnement

La distribution de la diversité génétique à l’échelle du globe reste méconnue, en particulier chez les poissons. Une équipe internationale impliquant des chercheurs de l’École Pratique des Hautes Études - PSL (EPHE-PSL), de l’Université de Montpellier, du CNRS, de l’Ifremer et de l’École polytechnique de Zurich a démontré que la diversité génétique n’était pas distribuée de façon homogène à l’échelle du globe, et que les facteurs environnementaux sous-jacents à cette distribution différaient entre les poissons marins et ceux d'eau douce. Ils ont également mis en évidence une faible concordance spatiale entre les points chauds de diversité génétique et les points chauds de la diversité des espèces, ce qui exige de renforcer les efforts de conservation. Cet article a été publié dans la revue Nature Communications le 10 Février 2020.

Distribution de la diversité génétique des poissons à l’échelle globale

La diversité génétique est le niveau élémentaire de la biodiversité. Elle contient le matériel (ADN) nécessaire pour permettre aux espèces de s’adapter au changement climatique, et aux autres stress exercés par les activités humaines. Les coûts (humains et financiers) ont ralenti jusqu’à présent les études décrivant la distribution de cette facette de la biodiversité à l’échelle du globe. Ces connaissances – ainsi que celles liées aux déterminants et mécanismes sous-jacents – sont pourtant essentielles si l’on souhaite conserver cette richesse sur le long terme.

A partir de données existantes, les chercheurs ont assemblé une base de données de plus de 50 000 séquences d’ADN mitochondrial géo-référencées appartenant à 3 815 espèces de poissons marins et 1 611 espèces de poissons d’eau douce. Ces données ont permis d’estimer la diversité génétique moyenne dans des cellules de 200 km de résolution.

Les analyses ont montré que la diversité génétique des espèces marines et d'eau douce était répartie de façon hétérogène à travers le monde. Les 10 % de cellules les plus riches génétiquement (points chauds) sont situées dans le Pacifique occidental, le nord de l'océan Indien et les mers des Caraïbes pour les espèces marines, tandis qu’elles sont localisées en Amérique du Sud pour les espèces d’eau douce.

En étudiant les facteurs environnementaux propres à chaque cellule, les auteurs ont par ailleurs démontré que la diversité génétique des espèces marines augmente avec la température, alors que la diversité génétique des poissons d’eau douce est principalement influencée par la complexité de l’habitat et l’histoire ancienne de la région.

Conséquences pour les stratégies de conservation

Les chercheurs ont détecté une faible corrélation entre la diversité génétique et le nombre d’espèces estimé dans chaque cellule, ce qui suggère que les points chauds de diversité génétique ne sont pas tous distribués dans les mêmes régions que les points chauds de diversité en espèces. Ce spatial mismatch a des implications fortes pour la conservation de la biodiversité : il appelle au développement de stratégies de conservation spécifiquement dédiées à la facette génétique de la biodiversité en plus de ceux entrepris pour protéger la diversité en espèces. Ces efforts seront peut-être atteints avec le nouvel objectif de protéger 30% des surfaces océaniques et terrestres d’ici 2030.

Pour aller plus loin : cartes mondiales interactives de la répartition de la diversité génétique

Cette étude est menée notamment par le CEFE et MARBEC.

Ce communiqué a été diffusé par l'EPHE-PSL

 

Référence

Global determinants of freshwater and marine fish genetic diversity. Nature Communications. 2020, 11:692 https://www.nature.com/articles/s41467-020-14409-7.pdf
Stéphanie Manel, Pierre-Edouard Guerin, David Mouillot, Simon Blanchet, Laure Velez, Camille Albouy, Loïc Pellissier